Histoire locale|

par Pierre PROUVEZE - Président de l'Association DAL MOULI AL ROC d'AGEL

Les origines de Névian

NEVIAN serait apparu au néolithique sur les hauteurs de Plan de Garrigue (170 mètres d’altitude). En descendant de la première éolienne vers la Combe Portale, les CAPITELLES sont des constructions de cette époque ou du moins leur mode de construction en pierres sèches a traversé le temps depuis 6 000 ans. Le nom de NEVIAN désigne un castrum gallo-romain par la terminaison « -an » de son nom. La mer s’étant retirée, le village serait descendu à l’époque gallo-romaine vers « Clottes » – avant la route nationale 113 actuelle (45 mètres d’altitude).

 En sont témoins : « vani clauses » avec des éléments de constructions d’une retenue d’eau et « paretz antiquos » des murs antiques. Au cours de charruages de vignes ont été trouvées des canalisations en poterie en forme de fourches, au lieu-dit « fourcadels ».

Puis, à l’époque moderne, le village se serait rapproché de l’eau – l’Orbieu – et aurait été construit à l’endroit de l’église et du « Fort » actuels (24 mètres d’altitude). Sur le plan du secrétariat de Mairie est indiqué le château du V° siècle, avec le « corps de garde », la « place du fort » et les fossés faisant le tour de ce qui appartenait au Chapitre de St Just au X° siècle. L’église – ancienne chapelle devenue plus grande que le château – date du XIV° siècle. Le château fut acheté par la famille Bédry, lors de la vente des biens nationaux et communaux.

Une bataille aurait opposé le duc de Joyeuse et le comte de Montmorency au XVI° siècle, dans le cadre des guerres de religion et surtout de la volonté d’amener le Languedoc à la couronne de France.

Le village vécut pendant des siècles de l’élevage de bêtes à laine, de la culture de céréales – un moulin -, d’oliviers – moulin à huile – et de vignes. La Révolution fit sortir le cimetière – près du jardin de Mr le Curé et la « maison du purgatoire » – et les bêtes à laine – la « jasse » et la « fédane » – du village par nécessité sanitaire.
En 1783, l’évêque-maire de Narbonne, Dillon, rapatriera à Narbonne le cantonnement de l’armée d’Espagne stationné à Névian – « les casernes » –.

Le Cahier de Doléances de la Révolution retrouvé nous permet de mieux connaître ce qu’était la vie du village en 1789 : « 72 feux » vivaient ici, les rives d’Orbieu régulièrement s’effondraient à cause du mauvais temps, l’hiver 1788 fut rigoureux. Sur les hauteurs de Plan de Garrigue, le télégraphe Chappe fonctionna entre 1780 et 1826.
Sur l’emplacement de maisons lui appartenant au milieu du village, Mr Bruguière construisit au XIX° siècle un « château », où la famille De Tarde vivra jusqu’au milieu du XX° siècle.
A l’emplacement de l’ancien cimetière se construisit en 1860 « le calvaire » avec l’argent de nombreux Névianais, religieux ou mécréants.

L’arrivée du chemin de fer, avec l’ouverture de la ligne Cette-Bordeaux, vit l’opposition de certains « qui craignaient que la fumée ne porte atteinte à l’agriculture », ce qui fit que la gare fut construite à Laparre sous le nom « gare de Villedaigne ». Mais ce progrès permit le développement de la monoculture de la vigne puisque le vin pouvait ainsi être transporté rapidement vers les villes, grandes consommatrices. Des négociants comme la Maison BRUEL s’installèrent. Seulement une halte permit aux Névianais d’aller à Narbonne de 1947 à 1970.

En 1882, comme dans toutes les communes de France, l’école sera construite sur son lieu actuel pour remplacer la trop petite salle de classe de la Mairie et permettre une égalité d’enseignement pour les enfants et de salaire pour les enseignants.

La crise du phylloxéra, fin XIX° siècle, la surproduction, la mévente amèneront aux manifestations de 1907 : la mairie votera une subvention « pour que les nécessiteux puissent aller en train à Montpellier pour manifester ». Le TOCSIN, journal du Comité d’Argeliers, notera une souscription venant de Névian. La pancarte « a fòrça de tibà lò faisset va petà » que l’on a retrouvée chez Ravaillan, félibre local, nous rappelle cette époque. Le PRESSOIR COMMUNAL dont on voit les traces des lettres sur la cave en face de l’église et du monument aux morts nous dit le caractère collectif du travail de la vigne qui s’en est suivi : mettre en commun d’abord un pressoir ambulant puis un pressoir fixe pour que chacun, notamment parmi les plus petits vignerons, puisse venir pressurer sa récolte.

La guerre de 14-18 eut son lot de victimes, la liste de leurs noms se trouve inscrite, ainsi que celle de ceux de 39-45, sur le monument aux morts construit en 1920-1921 sur l’emplacement du calvaire, dont Jean ESTRADE racontait que le maçon avait extrait du sol un crâne qu’il avait posé sur un mur au vu de tous les enfants sortant de l’école, preuve s’il en est que le cimetière était à cet endroit. La guerre de 39-45 verra l’occupation du village par les Allemands, la Mairie remplacée par la Délégation Spéciale nommée par le régime de Vichy et une déportation à Sigean sans conséquence heureusement de tous les jeunes Névianais de 17 à 45 ans.

Pour que les « jeunes gens » ne s’en aillent pas « attirés par les lumières de la ville », entre 1925 et 1928, la mairie construisit ce qui devait être la Maison Du Peuple et fut le Foyer des Campagnes et puis le Foyer.

La viticulture se développant verra la construction de caves particulières – SURBEZY, ESTRADE en 1919, O. FONTVIEILLE en 1930, DE TARDE, – et celle de la Cave Coopérative en 1936 avec toutes les forces vives du village – « petits » et « gros » que réunit le maire Marius LUQUET. Les lendemains de la guerre verront l’arrivée des tracteurs remplaçant petit à petit les chevaux qui étaient plus de 100 au début du XX° siècle. Le dernier cheval, « Gamin », sera mené à l’abattoir en 1976. La forge de Jules travaillera au milieu du village jusque dans les années 1960.

Même si, maintenant, beaucoup de maisons se construisent accueillant de plus en plus de gens travaillant à l’extérieur de Névian, la vigne reste l’activité économique du village avec la création du cellier de la Cave Coopérative « VIVO LO VI », nom de la « farceja » qu’écrivit Paul ALBAREL en 1904 à propos de la consommation du vin.

Des associations nombreuses se créeront à Névian au fur et à mesure des années pour que la vie commune soit plus importante. Les cafés – celui des « blancs » et celui des « rouges » – avec le « roi de la fête », les « jazz » dans le début du XX° siècle n’en étaient-ils pas un peu les précurseurs, comme lieux de sociabilité ?

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